L’automne s’est décidé à arriver et déjà les images de notre fin d’été culturel s’éloignent. Mais il est encore temps d’évoquer cette belle journée où pleines d’entrain et tout à la joie de nous retrouver, nous étions vraiment impatientes de découvrir les œuvres exposées aux Rencontres d’Arles. Nous les espérions originales, de qualité, excitantes, et appâtées par la renommée établie de cette manifestation, nous savourions d’avance le plaisir de déambuler à travers les différents lieux d’exposition.
Cependant, si cette journée s’annonçait pleine de promesses, le début de notre balade arlésienne transforme assez vite notre fougue en déception. Avant tout autre exposition, nous avons décidé de nous rendre à la Chapelle du Méjan. En effet, sous l’impulsion de Cy Twombly dont nous sommes, toutes les trois, d’irréductibles admiratrices, deux autres grands artistes que nous croisons fréquemment depuis quelques années sont les invités privilégiés de l’exposition « Le Temps retrouvé ».
En effet, que ce soient les portraits photographiques de Douglas Gordon ou ceux à la javel de Barceló, rien de bien palpitant devant ces tristes personnages. Je me détourne vite de des photos de stars brulées qui ne m’inspirent guère, malgré la possibilité trop évidente de jouer avec l’objectif.
Et les tableaux de Miquel Barceló ? Rien que de l’ennuyeux encore. Et pourtant je suis fan du catalan, mais là je ne suis pas émue, je ne me sens pas concernée.
Il ne reste qu’à admirer la beauté du lieu, les perspectives des colonnes et des voûtes, et se regarder, nous, dedans.
D’autres lieux nous attendent cependant et il nous faut tout de même voir de belles photos. Place de la République, l’église Sainte-Anne abrite une exposition vraiment intéressante même si elle concerne un genre qui ne m’a jamais passionnée : la photographie de presse, célébrée ici à la faveur des 30 ans du New York Times. Toutes les photos sont belles, réussies, témoignages de notre époque, illustrations de l’humanité, à la fois engagées ou frivoles. Nous apprécions tous ces clichés, commentons la technicité et la maîtrise des photographes, leur sens artistique. Je regarde longuement certaines d’entre elles mais surtout, tout en observant mes amies, je me risque à jouer la reporter.
C’est avec impatience que je les entraîne au Parc des Ateliers, dans l’atelier de mécanique, curieuse d’enfin découvrir l’exposition From Here On. J’adore les friches industrielles, celle qui nous est si familière, la Belle de Mai, celle découverte l’an passé à l’occasion de la biennale du design à Saint-Etienne, j’y trouve des lieux propices à l’art contemporain, terriblement urbains, à la fois chargés de patrimoine et ouverts sur l’avenir.
Mais si cet ancien site de la SNCF justifie notre ardeur, à nouveau une légère déception au regard de nos espérances. Ainsi, de tous les travaux amateurs trouvés sur le web et exposés, très peu ont suscité mon enthousiasme, m’ont étonnée. Evidemment, il y a toutes sortes de photographies et vidéos, originales ou déconcertantes et puis certaines vraiment kitsch, d’autres franchement écœurantes, mais là où j’attendais de la part d’amateurs éclairés fraîcheur percutante, naïveté vivifiante, application et simplicité méritoires, recherches esthétique et formelle, j’ai surtout trouvé laideur et mauvais goût, grossièreté et banalité, trop de poncifs et pas tant de liberté. Un joli manifeste, certes, et plein de bonne volonté, quelques images oniriques, quelques compositions expressives, mais guère de prétention, peu d’exaltation, d’originalité. Rarement l’émoi et la beauté.
Alors, là encore, regarder, chercher à comprendre, se questionner, mais aussi profiter du lieu et de l’atmosphère pour aussi se mettre en scène, s’amuser de nous-mêmes, apprendre à mieux nous connaître et communiquer. Par les mots et par les images.
Ce n’est pas si facile d’exprimer, de transmettre, de faire naître une émotion. Ce n’est pas si facile d’être un artiste ou tout simplement un bon photographe.

"From Here On" (À partir de maintenant), manifeste signé de cinq artistes et directeurs artistiques ( Clément Chéroux, Joan Fontcuberta, Erik Kessels, Martin Parr, Joachim Schmid )
Sylvie, octobre 2011