Musée sans Histoire(s) III

  « Un musée est une institution permanente, sans but lucratif, au service de la société et de son développement, ouverte au public et qui fait des recherches concernant les témoins matériels de l’homme et de son environnement, acquiert ceux-là, les conserve, les communique et notamment les expose à des fins d’études, d’éducation et de délectation. », Conseil international des musées (Statuts de l’ICOM, adoptés par la 22e Assemblée générale de l’ICOM – Vienne, Autriche, 24 août 2007)

 Musée,

Lieu ouvert à tous, dont les collections constituent notre patrimoine collectif. C’est souvent ce qu’expliquent au tout début de leurs visites, les conférenciers du Préau des Accoules. Un espace dédié aux enfants à proximité de la Vieille Charité dans le Panier. Cet ancien Observatoire qui a accueilli L’Académie des Belles Lettres, Sciences et Arts en 1782, se prête parfaitement à l’introduction aux œuvres d’art et culturelles, au travers d’animations, de jeux et de scénographies. Agnès, Sylvie et moi, comme de nombreux parents nous y avons souvent amené nos enfants. Parents et enfants avons autant de souvenirs et un rapport particulier à une exposition ; L’Égypte, Les Marins, les arts d’Afrique et d’Océanie… Tant d’histoires côtoyées introduites par une équipe qui conçoit, élabore et commente. Ceci est un petit remerciement amical à nos amis à qui nous souhaitons la poursuite de leur histoire et de celle du Préau des Accoules.

Sans Histoire(s),

Bien sûr que les musées ont une histoire, pour certains l’Histoire en est l’objet principal. Mais dans l’histoire des musées, certains ont disparu, certains n’ont pas encore vu le jour, comme c’est le cas pour Le Musée de l’Histoire de France voulu par Nicolas Sarkozy, et d’autres peuvent renaître sous d’autres appellations et d’autres formes… comme le Musée du Quai Branly à Paris et le MuCEM à Marseille.

13 Août 2010, visite du Musée du Quai Branly, Paris

13 Août 2010, visite du Musée du Quai Branly, Paris © Laure JEGAT 2013

 13 Août 2010, visite du Musée du Quai Branly, Paris

Je me retrouve au départ du premier volet de Musée sans Histoire(s), afin de reprendre le cours de mon explication. A essayer de dire pourquoi je cogitais et je comparais ces lieux de Culture à l’instigation de Présidents (Bibliothèque François Mitterrand, Pyramide du Louvre, Centre Georges Pompidou)… Et surtout le Musée du Quai Branly et Le futur Musée de l’Histoire de France de Nicolas Sarkozy. Quels rapports, quelles différences, quelles ambitions culturelles, politiques, idéologiques… ? Quelle compréhension et quelle conception du Monde ? Quelle appréhension et quelle vision de l’individu et de l’humanité ?

Laure, Marseille, 27 octobre 2010.

«  Cette nouvelle institution dédiée aux cultures autres sera, pour celles et ceux qui la visiteront, une incomparable expérience esthétique en même temps qu’une leçon d’humanité indispensable à notre temps.

 Alors que le monde voit se mêler les nations, comme jamais dans l’histoire, il était nécessaire d’imaginer un lieu original qui rende justice à l’infinie diversité des cultures, un lieu qui manifeste un autre regard sur le génie des peuples et des civilisations d’Afrique, d’Asie, d’Océanie et des Amériques. »

Jacques Chirac, Président de la République, Allocution à l’occasion de l’inauguration du Musée du quai Branly, le 20 juin 2006.

Ce discours d’ouverture, passionné, aboutissement d’une rencontre avec Jacques Kerchache évoque positivement dès son introduction, la polémique entre savoir et esthétisme, entre les partisans de l’un et de l’autre, entre chercheurs, conservateurs et artistes. Comme si la Beauté et la Connaissance étaient opposées. Comme si certains spécialistes, érigeant la Science supérieure à l’Art,  avaient oublié la devise de Paul Valéry inscrite au fronton du Musée de l’Homme… « Dans ces murs voués aux merveilles. J’accueille et garde les ouvrages. De la main prodigieuse de l’artiste. Égale et rivale de sa pensée. L’une n’est rien sans l’autre. »…

Comme le souligne Stéphane Martin, président du Musée du Quai Branly, lors d’une interview, cinq ans après, « Une des fonctions que le musée n’admet pas facilement, c’est qu’il crée du prestige. Il est aussi là pour créer de la valeur. Le fait que des cultures qui jusque-là étaient considérées simplement comme des espèces d’anecdotes ou des traces – certes intéressantes, exotiques – d’un monde en disparition aient accès au même piédestal, au même prestige, induit, curieusement mais réellement, un regard différent de respect et d’attention pour les créateurs de ces œuvres. Un musée comme le nôtre est indiscutablement un instrument de cohésion et de construction positive d’une société métisse ou pluriculturelle. ». La sacralisation de l’objet muséal accentue sa valeur esthétique et son intérêt culturel valorisant en retour la société dont il est issu. Si certains en doutent encore les objets originaires d’Afrique, d’Asie, d’Océanie et des Amériques ont une valeur esthétique, artistique, comme l’ont compris des artistes (Vlaminck, Gauguin, Cézanne, Matisse, Picasso…) il y a plus d’un siècle. Objets, qu’ils ont notamment découverts au cours de l’Exposition universelle de 1889. Le Musée de l’Homme, dont proviennent les collections du Musée du Quai Branly, et les Expositions Universelles ont une histoire commune et complexe, héritée du Muséum National d’Histoire Naturelle. Un établissement scientifique, de recherche et d’enseignement marqué par  « une double expansion coloniale et provinciale ». Les collections du Muséum, du Musée de l’Homme, Musée du Quai Branly et Musée National des Arts et Traditions Populaires… témoignent de ce développement historique et géographique. Une évolution muséale aussi qui n’a cessé de s’accentuer. Comme le Muséum, les autres musées parisiens s’agrandissent sur de nouveaux sites régionaux, le Centre Pompidou-Metz, le Louvre-Lens, collaborent et échangent avec l’étranger (Louvre d’Abou Dabi)…

Si le Musée du Quai Branly, plus que « là où dialoguent les cultures », est un lieu d’anthropologie sociale et culturelle qui nous fait prendre conscience d’ailleurs, un lieu de rencontres et d’ouvertures aux autres…  non européens… Le Musée National des Arts et Traditions Populaires (MNATP) est un musée d’ethnologie des sociétés traditionnelles françaises et européennes, inexploitées, mésestimées finalement elle aussi, au même titre, par les pouvoirs institutionnels et politiques… Sociétés traditionnelles, paysannes, campagnardes, provinciales, régionalistes… que de qualificatifs péjoratifs pour certains… Ce qui ne fut pas le cas pour Paul Rivet, fondateur du Musée de l’Homme et George-Henri Rivière, fondateur du MNATP, créateurs de ce « musée-laboratoire » en 1937. A l’occasion des 75 ans du Musée de l’Homme, au cours de son discours prononcé le 30 juin 2013,  Hélène Mouchard-Zay, fille de Jean Zay, nous raconte l’importance  de la démocratisation de la Culture pour lui, ministre de l’Education Nationale, des Beaux-Arts (« la Culture avant l’heure »), de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche pendant le Front Populaire.

Du 26 octobre 2010 au 8 mai 2013, visites régulières des sites du MuCEM en chantier… 8-9 Juin 2013, visite du MuCEM, lors du week-end d’ouverture, Marseille

Entre juin 1938 et juin 2013, le Musée National des Arts et Traditions Populaires voulu par Georges-Henri Rivière est devenu Le MuCEM (Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée), musée d’ethnologie française, profondément démocratique, ancien « musée de folklore – entendu comme l’étude du peuple », surnommé « le Louvre du Peuple », il s’intéresse à nous, nos modes de vie, nos histoires. Ses collections sont constituées d’objets, mais aussi de beaucoup de témoignages audio-visuels permettant d’illustrer un contexte, des usages et des modes de vie… A lire et voir les témoignages, photographies, documents des expositions passées, je réalise l’importance des nouveaux médias et technologies de recueil et de présentation de l’information, ceux de la scénographie et muséographie contemporaine mise en place par des professionnels passionnés poursuivant l’œuvre de Georges-Henri Rivière tel que Jean-Pierre Dalbera ou les museogeeks

« Ré-inventer un musée » entre 1998 et 2013, entre colloques, décisions et indécisions politiques, une aventure menée à bien sous la direction de Michel Colardelle puis de Bruno Suzzarelli… L’histoire du MNATP, ce musée parisien malgré ses succès populaires n’a pas laissé beaucoup de traces sur Internet, pour moi toujours à la recherche de documents cette absence m’interpelle, m’attriste et me questionne. Est-ce que le projet de Georges-Henri Rivière, si novateur, fut incompris par les instigateurs, chercheurs, institutionnels, politiques et publics ? Un musée peut-être venu au monde trop tôt, par la volonté d’un muséologue visionnaire.

Du Jardin Royal des plantes médicinales (XVIIe siècle) au Museum National d’Histoire Naturelle en passant par le Musée de l’Homme (Jardins du Trocadéro), le Musée des Arts et Traditions Populaires (Jardin d’Acclimatation), le Musée du Quay Branly (Jardin de Gilles Clément), le jardin botanique est toujours omniprésent et porteur de sens. A Marseille, le MuCEM a son jardin suspendu au Fort Saint-Jean : « Jardin des Migrations ». Encore un Jardin et un Musée évoquant les mouvements des plantes et les voyages des peuples. Ici, entre ciel et mer, au bout du quai du Grand Port Maritime, un Jardin et un Musée nous parlent de la Méditerranée et de l’Europe…

Laure, Marseille, 22 mai au 22 Juillet 2013.

Du 26 octobre 2010 au 8 mai 2013, visites régulières des sites du MuCEM en chantier... 8-9 Juin 2013, visite du MuCEM, lors du week-end d’ouverture, Marseille

Du 26 octobre 2010 au 8 mai 2013, visites régulières des sites du MuCEM en chantier…
8-9 Juin 2013, visite du MuCEM, lors du week-end d’ouverture, Marseille  © Laure JEGAT 2013

Revenir sur les précédents : Musée sans Histoire(s) I et  Musée sans Histoire(s) II 
 
A lire et à voir: 
– Quai Branly l’Autre Musée écrit et réalisé par Augustin Viatte, Documentaire Réalisation : Augustin Viatte (Production : Gédéon Programmes Co-Production : Musée du Quai Branly Diffusion : France 3 Durée : 51mn – 2006)
– Vie d’un musée, 1937-2005 / Martine Segalen (Editions Stock – 2005), à propos du Musée National des Arts et Traditions Populaires (MNATP)
– Pardonnez-moi : Darius Rochebin reçoit Jean Nouvel, architecte français (vidéo/YouTube)

A propos AssociatEyes

Les complices s’enrichissent, proverbe mis au goût du jour par Paul ELUARD ET Benjamin PERET, La Révolution surréaliste (1925)
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3 commentaires pour Musée sans Histoire(s) III

  1. Très belle ballade au Musée du Quai Branly!!! Merci beacoup pour le partager.
    Très belle soirée.

    • AssociatEyes dit :

      Merci, dans ce photomontage sur la visite du Musée du Quai Branly, j’ai essayé de rendre au mieux les émotions que m’avaient suscité le lieu… Très belle journée à vous chère fidèle lectrice :)))

      Gracias, en este fotomontaje sobre la visita del Museo del Muelle Branly, intenté volver lo mejor posible las emociones que me habían suscitado el lugar… Muy bonito día ustedes querida fiel lectora :)))

      (Espero que la traducción automática no sea demasiado mala ya que yo no hablo el español)

      Laure

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